Quels étaient les risques?
-Pour les pêcheurs.
Les accidents professionnels ainsi que les maladies diverses causées ou aggravées par les conditions de vie et de travail frappaient la grande majorité des matelots. Les plus faibles résistaient difficilement aux cadences infernales du travail et aux mauvais traitements de capitaines inhumains voire sadiques: le mot d’ordre « pêche ou crève » représentait bien l’état d’esprit. Les rudes manœuvres effectuées en boucle entrainent la formation de rhumatismes, la déformation des articulations, des fractures et des entorses ainsi que la défiguration des visages. De plus l’hygiène étant ce dont on se préoccupait le moins, des dermatoses diverses étaient fréquentes (telles que les abcès dentaires ou la gale) et des maladies telles que le scorbut ou la typhoïde se répandaient aisément. Ce n’est qu’en 1911 qu’une loi prescrit une visite médicale, mais elle n’était pas pour autant passée. Des hommes malades ou handicapés par les séquelles d’un accident tenaient tout de même à être embarqués pour pouvoir toucher leur retraite. En effet, aux termes d’une loi de 1897, pour percevoir sa pension de demi-solde versée par la Caisse des Invalides, un pêcheur âgé d’au moins 50 ans devait avoir accompli 25 ans de navigation, puis 25 campagnes de grande pêche à partir de 1905. De plus, la tuberculose trouvait en Terre Neuve un milieu très propice à son développement et sévissait toujours en 1919. Pendant le XIXe siècle, les médecins essayèrent de sensibiliser les capitaines et de leur apprendre des bases. Cependant même si certains veillaient à la santé de leurs matelots, d’autres étaient inhumains, cruels. Pour eux, aucune blessure n’était assez sérieuse pour qu’un matelot arrête la pêche : « la morue est le dictateur le plus volontaire, le plus absolu et le plus tyrannique que l’on puisse imaginer » (Jean Recher). Ainsi, souvent, les matelots taisaient leurs souffrances car ils ne voulaient pas perdre une année de navigation.
Les accidents professionnels ainsi que les maladies diverses causées ou aggravées par les conditions de vie et de travail frappaient la grande majorité des matelots. Les plus faibles résistaient difficilement aux cadences infernales du travail et aux mauvais traitements de capitaines inhumains voire sadiques: le mot d’ordre « pêche ou crève » représentait bien l’état d’esprit. Les rudes manœuvres effectuées en boucle entrainent la formation de rhumatismes, la déformation des articulations, des fractures et des entorses ainsi que la défiguration des visages. De plus l’hygiène étant ce dont on se préoccupait le moins, des dermatoses diverses étaient fréquentes (telles que les abcès dentaires ou la gale) et des maladies telles que le scorbut ou la typhoïde se répandaient aisément. Ce n’est qu’en 1911 qu’une loi prescrit une visite médicale, mais elle n’était pas pour autant passée. Des hommes malades ou handicapés par les séquelles d’un accident tenaient tout de même à être embarqués pour pouvoir toucher leur retraite. En effet, aux termes d’une loi de 1897, pour percevoir sa pension de demi-solde versée par la Caisse des Invalides, un pêcheur âgé d’au moins 50 ans devait avoir accompli 25 ans de navigation, puis 25 campagnes de grande pêche à partir de 1905. De plus, la tuberculose trouvait en Terre Neuve un milieu très propice à son développement et sévissait toujours en 1919. Pendant le XIXe siècle, les médecins essayèrent de sensibiliser les capitaines et de leur apprendre des bases. Cependant même si certains veillaient à la santé de leurs matelots, d’autres étaient inhumains, cruels. Pour eux, aucune blessure n’était assez sérieuse pour qu’un matelot arrête la pêche : « la morue est le dictateur le plus volontaire, le plus absolu et le plus tyrannique que l’on puisse imaginer » (Jean Recher). Ainsi, souvent, les matelots taisaient leurs souffrances car ils ne voulaient pas perdre une année de navigation.
L’alcool était souvent considéré comme le meilleur remède. En effet, une expression répandue disait « l’alcool est la boëtte de l’homme, comme l’encornet est la boëtte de la morue ». Les armateurs remplissaient la cambuse d’une grande quantité d’alcool très bon marché pour attirer les matelots. Une goélette emportait 1120 litres d’eau de vie, 22 barriques de cidre, 6 barriques de vin, 30 litres d’armagnac, du vermouth, du rhum, du cognac pour 22 hommes en 1878. L’alcool aidait à supporter les cadences infernales, le froid, la peur, les douleurs, la solitude morale, et il était très efficace pour calmer l’équipage quand un début de révolte se faisait sentir (sauf si le capitaine était un buveur lui-même). De 1896 à 1910, des lois tentèrent de limiter la quantité d’alcool emportée par les morutiers, elles prévoyaient des amendes et des interdictions de navigation pour le capitaine qui aurait embarqué des quantités d’alcool supérieures à celles autorisées. Elles furent très mal accueillies et la plupart des matelots en emmenaient au fond de leurs coffres.
L’hygiène était ce dont on se préoccupait le moins sur les morutiers. Absence complète de propreté, encombrement, humidité, méphitisme, une situation de saleté repoussante à un degré inimaginable. La morue primait tout, elle seule avait le droit aux soins les plus minutieux. Pour elle, on savait nettoyer et entretenir les cales dégagées, si bien qu’aucune critique n’était possible quant à la propreté de l’endroit où elles étaient entreposées. La cale à poisson se trouvait au milieu du bâtiment, c’est elle qui couvrait une place de choix, la plus étendue possible, au détriment du compartiment arrière, réservé à la chambre du capitaine et au logement des officiers, et surtout du poste avant destiné à l’équipage.
Les conditions de vie à bord n’ont jamais vraiment évolué par rapport aux premiers temps. De minimes améliorations furent apportées sur les trois mâts et les goélettes à la fin du XIXe siècle, mais la condition et les mœurs des matelots, à la veille de la première guerre mondiale, était toujours aussi déplorable. En effet, ils ignoraient les principes élémentaires de l’hygiène corporelle : c’était la « mode du banc », ne pas se laver et négliger toute propreté. Pour cause, le matelot n’avait ni le temps de se laver ni la motivation physique et morale, et l’eau dans les barriques était fréquemment mal nettoyée et strictement rationnée. Ils s’arrêtaient vers mai dans les ports pour se raser et se laver, la seule grande toilette en six ou sept mois. Sinon, après six semaines, le matelot retournait simplement ses vêtements. En 1913, un décret obligea les armateurs à embarquer une provision d’eau potable suffisante d’au moins 4 litres par jour par homme, mais la pêche durait tout de même souvent 24h, et les matelots ne prenaient toujours pas le temps de se laver.
Les conditions de vie à bord n’ont jamais vraiment évolué par rapport aux premiers temps. De minimes améliorations furent apportées sur les trois mâts et les goélettes à la fin du XIXe siècle, mais la condition et les mœurs des matelots, à la veille de la première guerre mondiale, était toujours aussi déplorable. En effet, ils ignoraient les principes élémentaires de l’hygiène corporelle : c’était la « mode du banc », ne pas se laver et négliger toute propreté. Pour cause, le matelot n’avait ni le temps de se laver ni la motivation physique et morale, et l’eau dans les barriques était fréquemment mal nettoyée et strictement rationnée. Ils s’arrêtaient vers mai dans les ports pour se raser et se laver, la seule grande toilette en six ou sept mois. Sinon, après six semaines, le matelot retournait simplement ses vêtements. En 1913, un décret obligea les armateurs à embarquer une provision d’eau potable suffisante d’au moins 4 litres par jour par homme, mais la pêche durait tout de même souvent 24h, et les matelots ne prenaient toujours pas le temps de se laver.
Interieur d'une goëlette- Les cabanes
Le poste d’équipage, qui était aussi la salle de repos, le fumoir et le dortoir, était d’une saleté répugnante. Sur les côtés se trouvaient les couchettes, basses et étroites, appelées « cabanes ». Leur longueur variait de 80cm à 1m50, et ce pour souvent deux matelots, qui devaient alors dormir sur le flanc. Elle servait aussi de cagibi. En 1908, des décrets imposèrent aux constructeurs de prendre en compte les conditions de logement des pêcheurs afin qu’ils aient un volume d’air convenable et un éclairage suffisant.
La seule journée de repos était le 15 aout, la fête de Marie vénérée par tous les marins, mais les jours de tempête ou de brume trop épaisse étaient des jours de pêche perdus. On les appelait « marées d’aornie », « de paradis » ou « de cabane ».
Les repas étaient frugaux, composé uniquement du plat de base sur les morutiers : la soupe ou le rata de tête de morue dans lequel on trempait des biscuits, une morue coûtait trop cher pour être mangée entière. A partir du XIXe siècle, on y ajouta des pommes de terre. Poisson sacré, la morue n’était servie entière que le vendredi, et pas sur tous les voiliers. Il n’y avait pas de pain ni de légumes mais des faux poissons (flétan, églefin, etc.) et des oiseaux de mers tirés aux fusils rompaient plus ou moins la monotonie du repas.
La seule journée de repos était le 15 aout, la fête de Marie vénérée par tous les marins, mais les jours de tempête ou de brume trop épaisse étaient des jours de pêche perdus. On les appelait « marées d’aornie », « de paradis » ou « de cabane ».
Les repas étaient frugaux, composé uniquement du plat de base sur les morutiers : la soupe ou le rata de tête de morue dans lequel on trempait des biscuits, une morue coûtait trop cher pour être mangée entière. A partir du XIXe siècle, on y ajouta des pommes de terre. Poisson sacré, la morue n’était servie entière que le vendredi, et pas sur tous les voiliers. Il n’y avait pas de pain ni de légumes mais des faux poissons (flétan, églefin, etc.) et des oiseaux de mers tirés aux fusils rompaient plus ou moins la monotonie du repas.
La goélette 'Aline' échouée sur des rochers le 11 juin 1907
Un des plus gros risque qu’encouraient les Terre Neuvas étaient les abordages et les naufrages. A partir de 1958, beaucoup de voiliers furent abordés par des «steamers » anglais, qui dans le brouillard ne pouvaient pas voir ni entendre les voiliers. Ceci était accentué par l’essor du trafic transatlantique des cargos et des paquebots dés le second empire. Il fallut attendre le naufrage du Titanic en 1912 pour que les grands paquebots modifient leurs routes. La mer très incertaine dans cette région était également facteur d’un grand nombre de naufrages. De plus, l’alcool n’arrangeait pas les choses, ni la vétusté de certains voiliers, si bien qu’entre 1852 et 1935, 120 goélettes ont disparu, causant la mort de 2000 hommes. Le médecin en chef de la marine en 1897 a comparé les pertes d’hommes en mer et celles sur les champs de batailles, et il en est arrivé à la conclusion qu’un homme courait le même risque s’il allait livrer deux grandes batailles que s’il s’embarquait sur un Terre Neuva. Jusqu’au XIXe siècle, les voiliers étaient également victimes de la piraterie, des corsaires et des vaisseaux de guerre ennemis.
Pêcheuses de crevettes improvisées
-Pour les familles
L’attente était éprouvante pour les épouses et les mères, elles faisaient brûler dans des niches des cierges jour et nuit tant que les hommes étaient absents. Assurer les besoins de la vie quotidienne était un souci permanent. Les avances accordées aux pêcheurs étant vite dépensés pour se chauffer, se vêtir et nourrir la famille, elles devaient trouver des sources de revenu. Elles pratiquaient des petits métiers et se faisaient souvent exploiter, si bien que, quand elles n’arrivaient pas à obtenir le minimum nécessaire, elles étaient contraintes d’acheter à crédit chez les commerçants ou de quémander un peu d’argent auprès des armateurs. Toutes ces dettes devaient bien sur être remboursées par les pêcheurs. Si bien que souvent en 1933, il arrivait parfois que 22 pêcheurs sur 27 d’une goélette étaient redevables à l’armateur à leur retour.
L’attente était éprouvante pour les épouses et les mères, elles faisaient brûler dans des niches des cierges jour et nuit tant que les hommes étaient absents. Assurer les besoins de la vie quotidienne était un souci permanent. Les avances accordées aux pêcheurs étant vite dépensés pour se chauffer, se vêtir et nourrir la famille, elles devaient trouver des sources de revenu. Elles pratiquaient des petits métiers et se faisaient souvent exploiter, si bien que, quand elles n’arrivaient pas à obtenir le minimum nécessaire, elles étaient contraintes d’acheter à crédit chez les commerçants ou de quémander un peu d’argent auprès des armateurs. Toutes ces dettes devaient bien sur être remboursées par les pêcheurs. Si bien que souvent en 1933, il arrivait parfois que 22 pêcheurs sur 27 d’une goélette étaient redevables à l’armateur à leur retour.
En 1870, devant le bureau de la marine, les veuves.
Les disparus en mer étaient vite oubliés, si la pêche était bonne, les misères s’oubliaient dans la mémoire de ceux rentrés saints et saufs. Quant aux veuves, avec leurs nombreux enfants, elles ne pouvaient pas se permettre de rester occupées.
Malgré tout ceci, les catastrophes les plus dramatiques n’empêchaient jamais les capitaines de constituer ou de compléter leurs équipages pour l’année suivante. Les risques et les difficultés du métier s’effaçaient devant la nécessité d’échapper aux conditions misérables de la vie dans les campagnes.
Malgré tout ceci, les catastrophes les plus dramatiques n’empêchaient jamais les capitaines de constituer ou de compléter leurs équipages pour l’année suivante. Les risques et les difficultés du métier s’effaçaient devant la nécessité d’échapper aux conditions misérables de la vie dans les campagnes.